La Suède, « superpuissance humanitaire » auto-proclamée, fière de défendre les « droits de l'homme », a retiré un orphelin de 6 ans de la garde de ses grands-parents pour l'expulser en direction d'un orphelinat en Ukraine. (L'image est illustrative et ne représente pas l'enfant dans l'article.) |
En octobre 2018, la Suède qui se flatte d'être une « superpuissance humanitaire », a décidé d'expulser un petit garçon de 6 ans en Ukraine. A la mort de sa mère, le gamin était devenu « techniquement » orphelin, son père, un Ukrainien vivant en Ukraine, ayant officiellement demandé à être déchu de ses droits parentaux. Privé de toute famille en Ukraine, le petit Denis était donc destiné à un orphelinat.
En 2015, la mère de Denis, accompagnée de son enfant, a quitté l'Ukraine pour rejoindre la Suède ou ses parents s'étaient installés. Mais pour des raisons inconnues - que les médias n'ont pas tenté de percer -, un permis de séjour lui a été refusé ainsi qu'à son enfant. L'Agence suédoise des migrations (Migrationsverket) a alors pris la décision d'expulser Denis, sans tenir compte du dossier de demande d'adoption déposé par les grands-parents maternels.
L'Agence des migrations a motivé sa décision en arguant que Denis « n'a pas fourni de raison plausible qu'une prise en charge adaptée ne lui serait pas fournie en Ukraine ». Par on ne sait quelle aberration, la décision administrative a été prise au nom de « l'intérêt supérieur de l'enfant ».
Que le garçon soit techniquement orphelin et que ses grands-parents, avec lesquels il vivait, aient entamé une procédure d'adoption, ne représentaient pas de motifs suffisant pour enrayer l'expulsion, a déclaré Karin Fährlin, chef de service au Migrationsverket.
« Ce dossier est celui d'... un garçon, citoyen ukrainien, et c'est à la famille, ou au père, ou aux autorités ukrainiennes de répondre de cet enfant. Voilà pourquoi [il sera expulsé] », a-t-elle déclaré.
L'expulsion de Denis, sitôt médiatisée, a provoqué un énorme scandale. Plus de 60 000 Suédois ont signé sur Facebook une pétition contre l'expulsion et plusieurs personnalités et hommes politiques ont publiquement exprimé leur dégoût. « Sa mère vient de mourir. Il n'a pas de père. Il a six ans et on le retire de chez ses grands-parents en Suède pour l'expulser en direction d'un orphelinat ukrainien ? C'est inhumain et dégoûtant » a écrit Jessica Almenäs, une vedette de la télévision.
La pression du public s'est avérée si forte que les fonctionnaires du Migrationsverket ont suspendu l'expulsion et ont estimé que leur décision avait peut-être été « trop hâtive ».
« Une enquête plus sérieuse aurait dû être enclenchée », a déclaré Per Ek, responsable du service de presse de Migrationsverket. « Nous allons nous y remédier dès maintenant ».
Les administrations et les organismes gouvernementaux prennent régulièrement de mauvaises décisions ; mais la particularité de celle-ci tient au fait qu'elle émane d'une autorité administrative chargée des migrations, sous tutelle du ministère des Affaires étrangères, lequel se targue de représenter un pays qui se glorifie d'être une « superpuissance humanitaire ».
Une « superpuissance humanitaire » autoproclamée n'est pas censée retirer les enfants de six ans à leurs grands-parents pour les expulser vers un orphelinat Ukrainien. La Suède est si fière de défendre les « droits de l'homme » qu'elle refuse d'expulser les pires criminels et terroristes si le risque le plus infime existe que leur vie soit en danger à leur arrivée.
Par contraste avec la mesure d'expulsion frappant le petit Denis, âgé de 6 ans, le Parlement suédois a adopté en juin 2018, une loi spéciale autorisant un très grand nombre de déboutés du droit d'asile à demeurer en Suède. Neuf mille "mineurs" non accompagnés en provenance d'Afghanistan – des personnes dont les demandes d'asile ont été rejetées et qui auraient donc dû être expulsées – se sont vu accorder un permis de séjour temporaire en Suède.
Les critiques acerbes des plus hautes agences gouvernementales n'y ont rien fait. D'autant qu'il a été établi que 7 000 de ces "enfants migrants non accompagnés" étaient en réalité des majeurs de plus de 18 ans. Les permis de séjour temporaires seront donc délivrés à ces « mineurs » qui ont prévu d'aller au collège ou qui y étaient déjà inscrits.
Passant outre les critiques de diverses administrations suédoises, passant outre la loi, le gouvernement a autorisés 9 000 Afghans déboutés et à l'identité invérifiable – faute de papiers sans doute – à demeurer dans le pays et à étudier aux côtés de lycéens suédois.
La police et les tribunaux de l'immigration ont jugé transgressive cette loi qui enfreint d'autres lois qui obligent les candidats à un permis de séjour de s'identifier clairement. Réduire cette exigence réduit la capacité des autorités suédoises à savoir qui vit dans le pays.
Le Conseil de la législation (Lagrådet), un grand corps de l'Etat composé de magistrats en activité et d'anciens juges de la Cour suprême chargé de valider les propositions législatives, a estimé que « la limite de l'acceptabilité a été atteinte en termes de formulation de la législation ». Cette appréciation inhabituelle et extrêmement sévère n'a pas empêché le parlement suédois de voter la loi. Et qu'une majorité de Suédois - 54% - se soit prononcé contre l'idée d'accepter 9 000 Afghans n'y a rien fait non plus. Selon le gouvernement, l'intégration des 9 000 "mineurs" afghans coutera 2,9 milliards de couronnes (environ 300 millions d'euros) au contribuable suédois au cours des trois prochaines années.
Après avoir légiféré en faveur des Afghans, la Suède n'a rien vu de contradictoire à prendre un arrêté d'expulsion contre un enfant vulnérable âgé de 6 ans, orphelin de mère, recueilli par ses grands-parents et inscrit dans une école maternelle suédoise. (Au moins jusqu'à ce que l'indignation du public l'oblige à réexaminer sa décision.)
En réalité, la mesure d'expulsion prise contre Denis apparait moins comme une erreur ponctuelle que comme la confirmation d'un biais : la Suède exprime une préférence envers certains groupes d'immigrés au détriment d'autres.
Dès 2001, un article de Dagen révélait que la Suède déboutait les demandeurs d'asile chrétiens beaucoup plus fréquemment que les demandeurs d'asile musulmans. En 2000, moins de la moitié (40%) des dossiers de demande d'asile déposés par les chrétiens avaient été acceptés, contre 75% pour les demandeurs musulmans.
Après le renversement de Saddam Hussein en 2003, les djihadistes ont multiplié les exactions contre les chrétiens d'Irak. Pourtant, en 2009, la Suède a gardé portes closes et a renvoyé en Irak les demandeurs d'asile irakiens chrétiens : sur les 25 chrétiens irakiens expulsés en 2009, 24 ont dû fuir l'Irak à nouveau, tandis qu'un s'est caché à Mossoul, a indiqué Sveriges Radio .
Un couple de chrétiens irakiens réfugié en Suède en 2005, a été expulsé de force en Irak en 2009 après quatre années passées dans le pays. L'homme et la femme ont dû fuir l'Irak à nouveau pour la Turquie. « J'aimais la Suède et le peuple suédois, mais je n'oublierai jamais la cruauté de ceux qui nous ont chassés. Ce fut un cauchemar. Etaient-ils vraiment Suédois ? » s'est demandé le couple au micro de Sveriges Radio.
À l'époque, Nina Shea, de la Commission américaine sur la liberté religieuse dans le monde, avait déclaré à Sveriges Radio qu'un nettoyage ethnique contre les chrétiens était en cours et qu'en Irak, le simple fait d'être chrétien vous plaçait automatiquement en position de victime sujette à des persécutions. A l'époque, les associations de défense des droits de l'homme s'étaient également exprimées en faveur des chrétiens en Irak, affirmant qu'il n'était pas prudent de les renvoyer là-bas au risque de voir les persécutions religieuses repartir de plus belle.
En dépit de ces mises en garde, les autorités suédoises chargées des migrations ont expulsé des chrétiens, affirmant que ces derniers « n'ont pas fourni la preuve qu'ils couraient un risque réel et prévisible de subir des sévices graves » s'ils retournaient en Irak, ont déclaré à l'époque les autorités.
En 2014, la « superpuissance humanitaire » a expulsé en Irak des personnes appartenant à la minorité chrétienne assyrienne, là où l'Etat islamique menait une impitoyable épuration ethnique et religieuse par le viol, la torture, l'esclavage et le meurtre. Mais la « superpuissance humanitaire » n'en a pas été impressionnée. Dans une de leurs nombreuses décisions d'expulsion à l'encontre des chrétiens assyriens d'Irak, les responsables suédois des migrations ont écrit
« En raison du déploiement de l'Etat islamique dans le nord du pays, les combats ont diminué à Bagdad. Certes, des attentats terroristes et des fusillades éclatent à Bagdad ... L'autorité des migrations estime que vous n'avez pas fourni de motif raisonnable qui étaye votre crainte d'être sérieusement maltraité... Vous n'êtes donc pas perçu comme ... ayant besoin de protection ... »
En juillet 2017, les autorités suédoises de l'immigration ont décidé d'expulser Aideen Strandsson. Cette actrice iranienne, secrètement convertie au christianisme en Iran, a pu émigrer en Suède en 2014 grâce à un visa de travail. Malgré la forte probabilité qu'elle soit emprisonnée à son arrivée - avec le viol et la torture couramment pratiqués dans les prisons iraniennes – et qu'elle encoure une condamnation à mort en raison de son apostasie (une peine presque systématiquement appliquée aux apostats), les autorités suédoises ont choisi d'expulser Strandsson en Iran. Lors de l'audience de Strandsson, un responsable suédois de l'immigration lui a déclaré que son retour en Iran ne serait pas aussi grave qu'elle l'imaginait et qu'elle ne « passerait pas plus de six mois en prison ». Les responsables suédois lui auraient également dit que sa conversion au christianisme ayant été une décision personnelle, elle devait en assumer seule les conséquences.
Heureusement, un contentieux judiciaire entre Strandsson et la police suédoise a retardé son expulsion sans butoir prévisible. En août dernier, Strandsson ignorait toujours la date de son expulsion.
Selon Gabriel Donner, avocat qui a plaidé les dossiers de demande d'asile de plus de 1 000 chrétiens, 8 000 chrétiens menacés par une ordonnance d'expulsion ont plongé dans la clandestinité en Suède.
Selon Donner, les responsables de l'immigration suédois ne comprennent pas ce qui pousse certains musulmans à devenir chrétien :
« Leur incompréhension saute aux yeux quand un converti déclare qu'il s'est converti à cause de l'amour qu'il a reçu de Jésus-Christ. Presque moqueurs, ils demandent au converti, qu'entendez-vous par amour ? Cette notion leur est tout à fait étrangère. »
En janvier 2018, le Comité des Nations Unies contre la torture (CAT) a empêché la Suède d'expulser au Pakistan un ancien musulman, Abdul Malik. Arrivé en Suède en 2012 en provenance de la province du Baloutchistan, Malik s'est converti au christianisme en 2015, a été baptisé et travaille depuis à la traduction de la Bible. Mais les autorités suédoises n'ont pas accordé le moindre crédit à sa conversion et, en 2017, ont décidé de l'expulser au Pakistan, où il risque d'être arrêté et torturé, non seulement en raison de ses activités politiques en faveur du Baloutchistan, mais également en raison de sa conversion au christianisme.
Alors, « Superpuissance humanitaire » la Suède ? Peut-être, mais avec quelques limites tout de même.