A ce jour, Boko Haram a détruit pas moins de 900 églises au nord du Nigéria et, depuis 2015, 16 000 chrétiens ont été assassinés. Photo : la Première Mission de l'Eglise Africaine incendiée à Jos, au Nigéria, le 6 juillet 2015. (Photo de l'AFP via Getty Images) |
Martha Bulus, une catholique nigériane, a été enlevée par des extrémistes islamiques de Boko Haram sur le chemin de sa fête de mariage. Martha et ses compagnes ont été décapitées et la vidéo de l'effroyable assassinat de ces 11 chrétiennes a été diffusée le 26 décembre au lendemain des fêtes de Noël. Ces images rappellent l'exécution d'autres chrétiens en combinaison orange, à genoux sur le sable avec derrière eux un djihadiste masqué, habillé de noir et appliquant le tranchant de son couteau sur leur gorge. Leurs corps ont été découverts dans une fosse commune en Libye.
Compte tenu de l'ampleur des persécutions antichrétiennes au Nigéria, Martha a eu moins de chance que Leah Sharibu. Enlevée il y a deux ans par Boko Haram, Léah vient de passer son deuxième Noël en captivité. La raison ? Leah a refusé de se convertir à l'islam et d'abjurer sa foi chrétienne. Les dirigeants chrétiens nigérians s'insurgent contre « les enlèvements continus de mineures chrétiennes par des jeunes musulmans ... ». Ces filles « sont converties de force à l'islam et mariées sans le consentement de leurs parents ».
Les islamistes du Nigéria mènent contre les chrétiens une guerre d'extermination. Pas moins de 900 églises du nord du Nigéria ont été détruites par Boko Haram. Le président américain Donald J. Trump a été informé qu'au moins 16 000 chrétiens ont été tués au Nigeria depuis 2015. Dans le seul diocèse de Maiduguri, 5 000 chrétiens ont été assassinés. Combien de chrétiens assassinés faudra-t-il avant que l'Occident y voie un "génocide" et se dresse pour y mettre fin ?
Au lendemain de la décapitation des chrétiens du Nigeria, le pape François a admonesté la société occidentale : « posez vos téléphones, parlez-vous pendant les repas ». Mais il n'a pas eu un mot pour les chrétiens décapités. Rien sur cette horrible exécution de ses frères et sœurs chrétiens. Peu auparavant, le pape François a érigé une croix entourée d'un gilet de sauvetage à la mémoire des migrants noyés en Méditerranée. En septembre dernier, le pape a inauguré un monument à la mémoire des migrants sur la place Saint-Pierre, mais pas une seule fois il n'a fait mention des chrétiens jetés à la mer par des extrémistes musulmans.
Le cardinal Robert Sarah, l'un des rares dirigeants catholiques qui ne ferme pas les yeux sur les persécutions islamiques, a twitté : « Au Nigeria, le meurtre de 11 chrétiens par des islamistes fous est un brûlant rappel de la situation faite à nos frères africains qui vivent leur foi dans le Christ au risque de leur propre vie. »
Le Vatican n'est pas le seul à demeurer silencieux. Aucun gouvernement occidental n'a pris la peine d'exprimer son horreur et son indignation face à la décapitation de Noël. « Où est l'horreur morale face à cette tragédie » a demandé l'évêque nigérian Matthew Kukah ? « Ces crimes font partie d'un drame beaucoup plus large avec lequel il nous faut vivre quotidiennement ».
Les dirigeants européens devraient suivre l'exemple du Premier ministre britannique Boris Johnson, qui, à l'occasion de son premier message de Noël à la nation, a déclaré :
« Aujourd'hui plus que jamais, je veux que nous nous souvenions de ces chrétiens qui un peu partout dans le monde sont victimes de persécutions. Pour eux, le jour de Noël donnera lieu à une cérémonie secrète, ou qui aura lieu peut-être dans une cellule de prison ».
La chancelière allemande Angela Merkel a déclaré que sa priorité était de lutter contre le changement climatique. Elle n'a pas eu un mot pour les chrétiens persécutés. Le président français Emmanuel Macron n'a pas jugé bon de souhaiter « Joyeux Noël » à ses compatriotes.
Au même moment, The Economist a écrit que le Premier ministre hongrois Viktor Orbán ne défendait pas passionnément les chrétiens persécutés, mais « exploitait » politiquement le sujet.
Les dirigeants européens n'ont pas condamné l'exécution barbare de chrétiens le jour de Noël : le politiquement correct ronge la société occidentale de l'intérieur.
Début décembre, Justin Kientega, évêque au Burkina Faso, a déclaré : « Personne ne nous écoute. A l'évidence, l'Occident n'est soucieux que de ses intérêts ».
« Pourquoi le monde garde-t-il le silence quand des chrétiens sont massacrés au Moyen-Orient et en Afrique» s'insurge Ronald S. Lauder, président du Congrès juif mondial ?
« En Europe et aux États-Unis, des manifestations ont été organisées contre la mort tragique de Palestiniens utilisés comme boucliers humains par le Hamas, l'organisation terroriste qui contrôle Gaza. L'ONU a mené des enquêtes et a concentré sa colère contre Israël qui ne fait que se défendre contre cette même organisation terroriste. Mais le massacre barbare de milliers et de milliers de chrétiens ne suscite qu'une relative indifférence ».
Qu'ont fait les gouvernements occidentaux quand des milliers de jeunes musulmans sont allés en Syrie et en Irak chasser et tuer des chrétiens, détruire leurs églises et leurs communautés ? L'Occident n'a pas levé le petit doigt mais il en a aussi payé le prix. Ce que les islamistes ont fait subir aux chrétiens d'Orient, ils ont commencé à les infliger à ces « post-chrétiens » d'Occident. Comme le disait le médiéviste français Rémi Brague, « les forces qui ont entrepris de chasser les chrétiens de leurs terres ancestrales se disent sans doute qu'il serait bon de poursuivre en Occident une œuvre si bien commencée en Orient ? ».
Les têtes chrétiennes qui roulent dans la poussière n'indignent pas l'Occident et son silence n'est rompu que de « Allahu Akbar », de coups de feu et de bombes. Les livres d'histoire du futur ne seront pas tendres face à cette trahison – mais tout dépend de qui va les écrire. La fin des chrétiens d'Orient serait un désastre. L'Église d'Occident n'aura plus un seul représentant vivant dans le berceau de sa civilisation.
De quels tombereaux d'indignation n'aurions-nous pas été abreuvés si, par exemple, des terroristes chrétiens avaient arrêté un bus, trié les passagers selon leur foi, et ordonné aux musulmans de se convertir au christianisme, avant d'assassiner 11 d'entre eux ? L'inverse vient de se produire au Kenya. Qu'avons-nous lu ? Rien. Le 10 décembre, le groupe terroriste islamique Al Shabaab a arrêté un bus dans le nord du Kenya, puis a assassiné les non-musulmans. Nous, Occidentaux, réagissons aux persécution de telle ou telle minorité ; pourquoi cet abandon des chrétiens ?
Le massacre des chrétiens au Moyen-Orient et en Afrique est au cœur d'une idéologie totalitaire christianophobe qui vise à unifier les musulmans de la Oumma (la communauté islamique) au sein d'un Califat, après avoir détruit les frontières des États nationaux et liquidé les « mécréants », c'est-à-dire les Juifs, les Chrétiens et toutes les autres minorités sans oublier les « apostats musulmans ». Le Nigéria l'avant-garde de ce drame.
« Le Nigeria est devenu le lieu le plus meurtrier au monde pour un chrétien », a déclaré Emmanuel Ogebe, avocat.
« Nous vivons un génocide. Ils essaient d'expulser les chrétiens, ils veulent posséder leur terre et tentent d'imposer leur religion à ces chrétiens qu'ils considèrent comme des infidèles et des païens ».
L'Occident lui dort sur ses deux oreilles. « L'Occident a ouvert ses frontières aux réfugiés musulmans qui fuyaient la guerre », écrit l'économiste Nathalie Elgrably-Lévy. « Cette solidarité occidentale a toutes les apparences de la vertu mais elle est sélective et discriminatoire ». Les chrétiens persécutés ont été abandonnés par les gouvernements et les opinions publiques occidentaux.
Le Premier ministre indien Narendra Modi a récemment suscité la colère des musulmans en tentant de promouvoir une loi qui offrirait la citoyenneté aux non-musulmans des pays voisins fuyant les persécutions. Tarek Fatah a expliqué dans le Toronto Sun que « l'octroi de la citoyenneté aux chrétiens pakistanais, hindous et sikhs persécutés augmenterait la population non musulmane et diluerait le droit de veto [dont les musulmans] disposent en Inde depuis 70 ans ».
Où sont les places publiques remplies de Londoniens ou de New-Yorkais mobilisés en faveur des réfugiés chrétiens discriminés par l'Occident ? Dans les provinces syriennes occupées par les islamistes, les chrétiens ont passé un « Noël spécial » - sans carillons ni lumières parce que leurs églises ont été transformées en écuries.
Le Khabour, cette région de Syrie où vivaient les chrétiens assyriens, est désormais baptisée la « vallée de la Mort ». L'ancien archevêque de Canterbury, George Carey, a récemment écrit :
« La guerre en Syrie a repris. Une fois de plus, les réfugiés inondent les routes et ont besoin de notre compassion. Pourtant, ces représentants de la « foi erronée » n'en trouveront aucune au sein du gouvernement britannique. Aucune des minorités les plus brutalisées n'a figuré au nombre des 16 000 réfugiés qui ont trouvé la sécurité au Royaume-Uni. 1,6% seulement des réfugiés qui ont intégré le Programme pour les personnes vulnérables en 2015, étaient chrétiennes. Les chrétiens représentaient pourtant 10% de la population syrienne ».
Les musulmans se mobilisent dans les lieux publics occidentaux pour défendre les leurs; mais pour nos frères chrétiens persécutés, ces mêmes lieux publics demeurent désespérément vides.
Giulio Meotti, journaliste culturel pour Il Foglio, est un journaliste et auteur italien.