En 2019, le ministre italien de l'Intérieur de l'époque, Matteo Salvini, a empêché qu'un navire garde-côtes débarque en Italie les migrants clandestins qu'il avait récupéré en mer cinq jours auparavant. Cette décision a valu à Salvini de répondre de l'accusation pénale d'« enlèvement ». L'Italie envoie à l'Europe et au reste du monde libre un bien inquiétant message : quiconque, dans l'exercice de ses fon1ctions, défend les frontières de son pays et tente d'arrêter une immigration illégale de masse peut se retrouver jugé et emprisonné. (Photo de Piero Cruciatti / AFP via Getty Images) |
« Mon seul regret dans cette affaire est que je vais devoir expliquer à mes deux enfants que leur père n'est pas jugé parce qu'il est un criminel, mais parce qu'il a défendu son pays », a déclaré Matteo Salvini le jour où le Parlement italien l'a déchu de son immunité pour qu'il puisse être jugé.
Pendant des années, la classe politique italienne a eu pour politique migratoire de baisser les bras devant les flux d'immigrants illégaux – généralement organisés par des mafias criminelles. L'Europe de son côté n'a jamais levé le petit doigt. Aujourd'hui, ces « élites » - hommes politiques, faiseurs d'opinion, journalistes - ont décidé d'envoyer Mattéo Salvini devant un juge parce qu'il a eu le courage qu'ils n'ont jamais eu, de défendre les frontières de l'Italie.
Salvini risque 15 ans de prison pour « enlèvement ». Sa mise en examen remonte à 2019. A cette époque, en poste au ministère de l'Intérieur, il avait empêché un navire garde-côtes de débarquer sur la cote italienne, les migrants clandestins qu'il avait repêché en mer cinq jours auparavant. Salvini a déclaré qu'il défendait son pays et qu'il agirait de même encore aujourd'hui. « Je pars avec une conscience propre, et avec la fierté de savoir que j'ai défendu l'honneur de l'Italie », a-t-il posté sur Facebook.
Quand il a été nommé à l'Intérieur, Salvini a adopté une ligne dure à l'égard des migrants. Il a bloqué l'accès des ports italiens aux navires de sauvetage en mer et a fait voter une loi qui autorise la saisie et la mise à l'amende des navires qui transportent des migrants.
Le 26 juillet 2019, Salvini a interdit que le Gregoretti qui venait d'atteindre la côte est de la Sicile débarque son contingent de migrants. « J'ai ordonné qu'aucun port italien ne soit accessible avant qu'une clé de répartition des 140 migrants présents à bord ne soit mise en place en Europe » a-t-il déclaré. Immédiatement après l'accostage du navire - quelques pays européens s'étant proposés pour héberger les migrants - un procureur a ouvert une instruction pour enlèvement contre Salvini.
Salvini a par la suite justifié sa décision ainsi : « un délai s'est avéré nécessaire pour organiser la répartition des migrants dans d'autres pays européens, avec la pleine implication du gouvernement italien ». A l'époque, l'Italie avait désespérément besoin d'un accord de répartition et l'Europe n'avait pas bougé le petit doigt. Comme l'a déclaré à l'époque Edi Rama, premier ministre albanais, « l'Italie a été abandonnée par l' Europe sur la question des migrants ».
Cela peut paraître mélodramatique, mais Salvini a compris que ce qui était en jeu, c'était la survie de l'Italie telle que nous la connaissons. Un rapport du Centre Machiavel indique que si les tendances actuelles se maintiennent, d'ici 2065, le nombre des immigrés de première et deuxième génération dépassera les 22 millions de personnes. Ils représenteront plus de 40% de la population totale d'un pays, l'Italie, dont le taux de natalité « s'est effondré ».
Pour la première fois en Europe, un tribunal est appelée à juger un ministre – précisément celui qui était en charge de la sécurité du pays – qui aura bloqué des migrants dans un port en attendant qu'un accord de répartition soit mis en place en Europe.
Une règle non écrite veut que des dizaines de milliers de personnes peuvent s'embarquer en Libye en direction de l'Italie sans contrôle, sans dissuasion, et sans que le pays d'accueil puisse se prévaloir d'un quelconque droit de légitime défense face à ce tsunami migratoire historique.
En fermant les frontières, en infligeant des amendes aux ONG et en rendant plus difficile l'accès aux côtes italiennes, Salvini a pu réduire les flux entrants de migrants, quitte à ce que cela se traduise par la mort tragique de migrants en Méditerranée. Mais depuis quand un pays a-t-il l'obligation d'apporter son aide à des trafiquants industriels de main d'œuvre ?
La politique d'immigration de Salvini votée en 2018, a réduit considérablement le nombre des arrivées de migrants. Celui-ci est passé de 119 369 en 2017 à 23 370 en 2018 – soit une baisse de 80%, selon les Nations Unies.
L'année dernière cependant, après le départ de Salvini, le nombre de migrants a triplé. Selon le ministère de l'Intérieur, en 2019, alors que Salvini était ministre de l'Intérieur, 7894 migrants sont arrivés en Italie. Aujourd'hui, au cours des neuf premiers mois de 2020, 24 332 migrants ont débarqué et circulent librement dans toute l'Italie et dans le reste de l'Europe.
L'Italie a récemment dû envoyer la troupe pour empêcher les migrants de rompre leur mise en quarantaine pour cause de coronavirus. Des « ports fermés » de Salvini à l'anarchie, la distance est faible.
Le lendemain du jour ou a débuté le procès de Salvini, le gouvernement a assoupli les règles sanctionnant les ONG qui favorisent l'arrivée de migrants clandestins.
Aujourd'hui, l'Italie envoie un message inquiétant à l'Europe et au reste du monde libre : quiconque occupant des fonctions officielles défend les frontières de son pays et tente d'arrêter l'immigration illégale peut se retrouver jugé et emprisonné. Nous assistons au suicide d'un pays et d'un continent.
La véritable horreur dans cette mascarade est que l'Italie refuse toujours l'accostage de navires transportant des migrants mais persiste à punir Salvini. Comprenne qui pourra !
Giulio Meotti, rédacteur culturel à Il Foglio, est un journaliste et auteur italien.