Près de deux-tiers des Allemands pensent que l'islam ne fait pas partie intégrante de l'Allemagne selon un récent sondage d'opinion qui a montré également que seulement 22% des Allemands considèrent que l'islam fait partie intégrante de la société allemande.
Dans un sondage similaire réalisé en janvier 2015, 37% des Allemands ont répondu que l'islam fait partie intégrante de l'Allemagne, 15% de plus qu'aujourd'hui. Ces résultats indiquent que les attitudes allemandes envers l'islam se durcissent après la décision prise par la Chancelière Angela Merkel de permettre à plus d'un million 100.000 migrants, pour la plupart musulmans, d'entrer en Allemagne.
Ce sondage a ouvert encore un nouveau chapitre du débat qui dure depuis décennie sur la phrase « l'islam fait partie intégrante de l'Allemagne ». Ces mots ont été prononcés pour la première fois en septembre 2006 – il y avait alors trois millions et demie de musulmans en Allemagne, par comparaison avec les six millions d'aujourd'hui – par Wolfgang Schäuble, qui était alors ministre de l'Intérieur.
Prenant la parole avant la première Conférence Allemagne-Islam qu'il y ait jamais eu, le premier dialogue institutionnalisé entre des représentants du gouvernement allemand et des musulmans en Allemagne, Wolfgang Schäuble a déclaré : « l'islam fait partie intégrante de l'Allemagne et fait partie intégrante de l'Europe. L'islam fait partie intégrante de notre présent et fait partie intégrante de notre futur. Les musulmans sont les bienvenus en Allemagne. »
Cette phrase a été reprise en octobre 2010 par Christian Wulff, alors Président de l'Allemagne, pendant une allocution principale prononcée pour marquer le vingtième anniversaire de la réunification allemande. Christian Wulff a alors proclamé que « l'islam fait partie intégrante de l'Allemagne » parce que des millions de musulmans y vivent :
« La chrétienté, à coup sûr, fait partie intégrante de l'Allemagne. Le judaïsme fait clairement partie intégrante de l'Allemagne. C'est notre histoire judéo-chrétienne. Mais aujourd'hui l'islam fait aussi partie intégrante de l'Allemagne (Der Islam gehört inzwischen auch zu Deutschland). »
Christian Wulff a alors cité le poète allemand Johann Wolfgang von Goethe, qui, dans son « Divan d'Orient et d'Occident » (West–östlicher Divan, 1819) a écrit : : Celui qui se connaît et connaît les autres comprendra que l'Est et l'Ouest ne peuvent plus être séparés. »
Depuis lors le débat a fait rage sur la question de plus en plus controversée de l'immigration, l'intégration musulmane et le rôle de l'islam dans la société allemande. L'Université de Bonn a lancé un projet de recherche intitulé « À quel point l'islam fait-il partie intégrante de l'Allemagne ? » La Fondation Konrad Adenauer a publié cet article : « Quel islam fait partie intégrante de l'Allemagne ? ». Selon Heinrich Bedford-Strohm, à la tête de l'Église Luthérienne d'Allemagne, seul « un islam démocratique fait partie intégrante de l'Allemagne. »
Ce qui suit est une revue historique abrégée de la phrase « l'islam fait partie intégrante de l'Allemagne ».
3 mars 2011. Lors de sa première conférence de presse en tant que ministre de l'Intérieur allemand, Hans-Peter Friedrich a déclaré que l'islam ne fait pas partie intégrante de l'Allemagne. « Dire que l'islam fait partie intégrante de l'Allemagne n'est pas un fait étayé par l'histoire à aucun moment. » Il ajoutait que les immigrants musulmans devaient respecter « l'origine chrétienne occidentale de notre culture ».Ces commentaires ont suscité un déluge de critiques de la part des gardiens du multiculturalisme allemand.
4 mars 2011. Wolfgang Bosbach, du parti des Démocrates Chrétiens au pouvoir (CDU), défendait Hans-Peter Friedrich : « J'aime les hommes politiques qui disent ce qu'ils pensent. L'islam fait partie intégrante de la réalité de l'Allemagne mais ne fait pas partie intégrante de l'identité allemande. »
5 mars 2011. Alexander Dobrindt, Secrétaire général du parti de l'Union Sociale Chrétienne (CSU), parti frère du CDU d'Angela Merkel, a déclaré : « Bien sûr qu'il y a des musulmans en Allemagne. Mais l'islam ne fait pas partie intégrante de la culture allemande principale (Leitkultur). » Le dirigeant parlementaire du CDU, Volker Kauder, a déclaré : « l'islam n'a pas façonné notre société par le passé et ne le fait pas aujourd'hui. L'islam ne fait donc pas partie intégrante de l'Allemagne. »
31 mai 2012. Le nouveau Président allemand, Joachim Gauck, a pris ses distances avec les commentaires de Wulff : « La réalité est que beaucoup de musulmans vivent dans notre pays. J'aurais simplement dit que les musulmans qui vivent ici font partie intégrante de l'Allemagne. » Il ajoutait : « Où l'islam a-t-il été façonné en Europe ? L'islam a-t-il connu l'Âge des Lumières ou même une Réforme ? »
12 janvier 2015. La Chancelière Angela Merkel, lors d'une rencontre à Berlin avec le Premier ministre turc, Ahmet Davutoglu, a déclaré : « L'ancien Président allemand, Christian Wulff, a dit : ' l'islam fait partie intégrante de l'Allemagne.' C'est vrai. C'est également mon opinion. » Elle soulignait la nécessité de « renforcer le dialogue entre les religions car il y a encore trop d'ignorance. »
13 janvier 2015. Hans-Peter Friedrich, l'ancien ministre de l'Intérieur, contestait ce qu'avait dit Angela Merkel, à savoir que l'islam fait partie intégrante de l'Allemagne :
« Les musulmans qui vivent dans ce pays, qui sont attachés à ce pays, font sans aucun doute partie intégrante de l'Allemagne. Il n'y a rien à nier et rien à relativiser. Mais je ne vois nulle part en quoi l'islam fait partie intégrante de l'Allemagne. L'islam n'est pas un élément formateur, constitutif de l'identité de notre pays. »
« Le problème s'articule autour de la question de savoir ce qui est constitutif, ce qui fait l'identité de ce pays. L'identité de ce pays qui s'est développée pendant des siècles n'est pas l'islam mais une culture chrétienne, fondée sur des racines chrétiennes et juives. »
« L'islam n'est pas un élément caractéristique de l'identité de ce pays. Quiconque voyage en Allemagne peut le voir. On voit des églises et des tableaux, on peut écouter de la musique qui a des racines ecclésiastiques, vielles de plusieurs siècles, on voit de l'art et de l'architecture qui sont marqués par la chrétienté. »
« Si l'islam devient un élément caractéristique en Europe ou en Allemagne dans des centaines d'années, seul le temps le dira. »
20 janvier 2015. Thilo Sarrazin, ancien banquier renommé de la Banque centrale et membre du parti Social Démocrate (SPD), qui avertit depuis des années les Allemands des conséquences d'une immigration massive a critiqué Angela Merkel :
« Lorsque la Chancelière dit qu'elle pense que l'islam fait partie intégrante des traditions et de la culture en Europe, elle se trompe. Lorsque Angela Merkel dit que les musulmans devraient bénéficier pleinement de la citoyenneté en Allemagne et seront les bienvenus s'ils s'intègrent, ce qu'elle dit est vrai, bien que banal. »
Il dit que l'islam, « avec toutes ses manifestations radicales, violentes », n'est arrivé en Allemagne que ces quarante dernières années à cause « d'une immigration massive non planifiée et incontrôlée dans la société allemande. » Il ajoutait : « de plus, ce que dit Angela Merkel, masque le vrai problème : une proportion croissante de citoyens musulmans en Europe ne partagent pas le système de valeurs occidental, ne veulent pas s'intégrer sur le plan culturel et s'enferment dans des sociétés parallèles. » -
30 juin 2015. Angela Merkel, prenant la parole à Berlin après l'Iftar, un dîner qui marque la fin du jeûne quotidien pendant le Ramadan, a déclaré : « Il est indiscutable et évident que l'islam fait désormais partie intégrante de l'Allemagne. »
21 septembre 2015. Edmund Stoiber, Président honoraire de l'Union Sociale Chrétienne (CSU), parti frère en Bavière du CDU d'Angela Merkel, a dit : « Je ne peux accepter la phrase 'l'islam fait partie intégrante de l'Allemagne'. Les musulmans font partie intégrante de l'Allemagne, mais pas l'islam. L'islam n'est pas un élément central de la culture allemande et n'a pas façonné notre histoire et notre tradition intellectuelles. »
17 avril 2016. Beatrix von Storch, vice-Présidente du parti anti-immigration une Alternative pour l'Allemagne (AfD), aujourd'hui le troisième parti politique en termes de popularité en Allemagne, a déclaré : « Beaucoup de musulmans font partie intégrante de l'Allemagne, mais pas l'islam. L'islam est, à la base, une idéologie politique qui n'est pas compatible avec la Constitution allemande. »
Alexander Gauland, le dirigeant de l'AfD pour le Brandebourg, précisait : « l'islam n'est pas une religion comme le catholicisme ou le protestantisme. Sur le plan intellectuel, l'islam est toujours lié à une volonté de renverser l'État. L'islamisation de l'Allemagne constitue donc une menace. »
1er mai 2016. Le parti AfD a adopté un manifeste qui appelle à une réduction de l'immigration et à des restrictions à propos de l'islam. Le document appelle à interdire les minarets, les appels à la prière musulmane et les voiles qui couvrent le visage :
« L'islam ne fait pas partie intégrante de l'Allemagne. L'AfD considère que la propagation de l'islam et le nombre croissant de musulmans en Allemagne est un grand danger pour notre pays, notre société et notre système de valeurs. Un islam qui ne respecte pas notre système juridique, le combat même et affirme être la seule religion acceptable est incompatible avec notre système juridique et notre culture. Beaucoup de musulmans vivent en se conformant à nos lois, sont intégrés et acceptés en tant que membres respectés de notre société. Cependant, le parti AfD veut empêcher l'émergence de sociétés parallèles islamiques avec des juges de la charia. L'AfD veut empêcher la radicalisation des musulmans et qu'ils se tournent vers le salafisme violent et le terrorisme religieux. »
5 mai 2016. Le dirigeant parlementaire du CDU, Volker Kauder, a déclaré que le choix des mots utilisés par Christian Wulff en 2010 partait « d'un bon sentiment mais était imprécis ». Il a dit que si les musulmans font partie intégrante de l'Allemagne, ce n'est certainement pas le cas de l'islam : « l'Allemagne n'a pas été façonnée sur le plan historique ou culturel par l'islam ». Selon Volker Kauder l'islam se manifeste de diverses manières et « certaines ne pourront jamais être acceptées en Allemagne ». Il ajoutait : « pour nous le religion n 'est jamais au-dessus de l'État ». La liberté de culte n'est pas sans limites, dit-il, mais est contenue par la Constitution allemande.
16 mai 2016. Le journaliste allemand Henryk Broder écrivait :
« Quiconque pense que l'islam fait partie intégrante de l'Allemagne ne devrait pas hésiter à aller plus loin et déclarer que la charia fait partie intégrante de l'Allemagne. Sans la charia il n'y a pas d'islam authentique. 'L'islam européen' que veulent beaucoup est une chimère comme l'a été le 'communisme européen' pendant la Guerre Froide.
« Cela faciliterait de manière significative une coexistence pacifique sur des bases solides. Cela serait aussi la fin de tout débat – sur l'égalité hommes-femmes, le mariage pour tous, le voile dans la fonction publique, la séparation du pouvoir en politique, la séparation entre l'Église et l'État, les caricatures et la satire. Nous pourrions gagner beaucoup de temps et nous occuper de questions vraiment pertinentes. Comme, par exemple, : Jésus était-il le premier musulman ? »
Dans un discours du 22 octobre 2014, la Chancelière Angela Merkel a dit être d'accord avec cette déclaration de l'ancien Président allemand, Christian Wulff, : « l'islam fait partie intégrante de l'Allemagne. » |
Soeren Kern est Associé principal de Gatestone Institute qui est basé à New York. Il est également Associé principal pour la politique européenne du Estudios Estratégicos / Groupe d'Études Stratégiques basé à Madrid. On peut le suivre sur Facebook et Twitter. Son premier livre Global Fire, - Incendie Mondial - sera publié en 2016.